Qu’elles soient locales, nationales ou internationales, les mobilisations et les contestations liées à l’alimentation regroupent un large éventail de pratiques allant des actions collectives de producteurs ou de consommateurs aux mouvements sociaux et politiques structurés. À partir d’une définition large et inclusive de la notion de, ce texte explore diverses formes, conceptions et pratiques du food activism observables en Europe. Comment pouvons-nous analyser le food activism et quelles sont ses limites ? Quels types d’économie imaginent ou pratiquent les food activists ? Quels types de positions défendent-ils et quelles stratégies mettent-ils à l’œuvre en Europe ? À partir de deux cas d’étude – le mouvement international Slow Food et les systèmes de paniers de légumes de type AMAP –, il s’agira d’avancer quelques hypothèses concernant les paradigmes et les pratiques de ces activismes. Interroger le food activism nous permet de comprendre non seulement les changements qui affectent dans le temps ces formes de mobilisation et leurs objectifs, mais aussi les liens et connexions entre différents types d’activismes liés à la sphère de l’alimentation. Cela nous conduit parallèlement à interroger nos propres paradigmes et nos propres pratiques de recherche.
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« Food activism » en Europe : changer de pratiques, changer de paradigmes
27 octobre 2021, par Mathilde COUDRAY -
La politisation de l’alimentation ordinaire par le marché
23 novembre 2021, par Mathilde COUDRAYLes grandes entreprises de l’alimentation de masse font aujourd’hui face à des critiques, à une défiance croissante et à un tassement de leurs parts de marché. Si les dimensions politiques de l’assiette engagée des militants et de l’assiette caritative des pauvres et des aidés ont été pointées dans la littérature, celles de l’assiette ordinaire de la consommation de masse ont été peu abordées. Cet article dépeint l’évolution de la défiance, en France et aux États-Unis, depuis une cinquantaine d’années, et ses effets visibles dans les transformations de l’offre alimentaire, à travers le recyclage, par les industriels, des critiques à leur endroit. L’article donne à voir un processus qui conduit à une visibilité croissante des dimensions politiques de l’alimentation industrielle de masse – au sens de la multiplication des choix par lesquels l’alimentation connecte et insère les mangeurs dans un système social et technique. En effet, le recyclage de la critique conduit à une diversification des qualités : modes de production, origine et nature des matières premières. Cette diversification souligne indirectement l’opacité des marques historiques et de l’alimentation de masse. La contingence des choix qui guident leur production en devient plus apparente. Le rapport critique, voire conflictuel, à l’alimentation industrielle de masse devient ainsi moteur d’une politisation de l’alimentation ordinaire. Cette réintroduction du politique dans le marché témoigne de la dimension constructive de la défiance.
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Genre et alimentation à l’épreuve de la vie urbaine en Afrique, Amérique latine Asie
1er juillet 2022, par Mathilde COUDRAYNuméro thématique de la revue Anthropology of Food valorisant plusieurs papiers issus du colloque "Manger en ville" d’octobre 2020.
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Alimentation et identité entre deux rives
26 octobre 2021, par Mathilde COUDRAYQue l’on soit né au Maroc ou en France de parents marocains, l’alimentation occupe une place centrale dans le tissage du lien avec ses origines réelles, rêvées ou mythiques. À travers l’analyse de récits de vie de Marocains vivant en France, il s’agit de comprendre comment l’alimentation nourrit les constructions identitaires, individuelles et collectives, comment elle intervient dans la construction de sentiments d’appartenance et d’intégration, et comment elle permet à l’esprit et au corps de s’amarrer à un ici ou à un ailleurs.
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Le genre de l’ivresse. Évolution des consommations d’alcool chez les étudiant-e-s
26 octobre 2021, par Mathilde COUDRAYLe boire alcoolisé se prête particulièrement bien à une analyse en termes de genre. Cet article examine la construction sociale de la réalité concernant les modalités genrées du boire chez les jeunes, à partir d’une recherche en population étudiante. Entre le toxique et l’aliment, la « culture de l’ivresse » et la « culture du vin », le boire des jeunes et son évolution articulent différentes normes et différents rapports aux normes. L’évolution des rapports sociaux entre les sexes en matière de consommation estudiantine mérite d’être étudiée de près : contrairement aux discours récents de la prévention et de la santé publique mettant l’accent sur l’explosion des consommations chez les étudiants et la dissolution du genre, on observe avant tout le rapport étroit à l’ivresse qui évolue vers la modération et un maintien de la dissymétrie du genre tout au long des parcours de consommation.
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Se nourrir de promesses. Enjeux et critiques de l’introduction de deux innovations dans le domaine alimentaire : test nutri-génétique et viande in vitro
3 novembre 2021, par Mathilde COUDRAYDepuis une quinzaine d’années, deux innovations à composante biomédicale et technoscientifique s’immiscent dans le domaine alimentaire : les tests nutri-génétiques et la viande in vitro. Cet article s’intéresse aux promesses qui les accompagnent. Pour les appréhender, les auteurs se sont penchés sur leur introduction dans l’espace public, l’identité de leurs promoteurs et les enjeux sociaux soulevés. L’analyse croisée de ces promesses conduit à une réflexion critique sur l’autonomisation autour des deux injonctions normatives les plus prégnantes dans le domaine alimentaire : améliorer sa santé et protéger l’environnement. Si ces innovations nourrissent la capacité des individus à conduire leur alimentation, elles renforcent dans le même temps une dépendance à la technique et à ses possesseurs.
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Frontières alimentaires et mets transfrontaliers. La pizza, questionnement d’un paradoxe
26 octobre 2021, par Mathilde COUDRAYAttestée depuis au moins le XVIe siècle à Naples, la pizza a connu au XXe siècle et plus particulièrement après la Seconde Guerre mondiale une diffusion quasi universelle. Met aux racines archaïques devenu étendard de la modernité, la pizza a traversé l’histoire comme les aires géographiques et culturelles. Pourtant, cet atypique comestible transfrontalier ne signe pas l’effacement des frontières : son adoption s’accompagne toujours d’un processus de réappropriation au cours duquel elle est pétrie de traits de culture locale et s’intègre harmonieusement dans un système de règles lui préexistant. Au terme de ce processus de réappropriation auquel la malléabilité inédite de la pizza laisse prise, le mets fait à nouveau frontière pour tout autre groupe que celui qui l’a travaillé et remis en forme. La pizza est un objet culturel qui offre un exemple particulièrement intéressant de la manière dont la diversité se maintient et se renouvelle dans le flux des emprunts, et permet dans le même temps de revisiter les scénarios d’homogénéisation culturelle et culinaire, ou l’effacement des frontières qu’induirait le processus de mondialisation. Le fait est piquant, relevons le, c’est tout justement la pizza qui, plus souvent qu’à son tour, est utilisée pour témoigner de l’érosion des spécificités culturelles.
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L’animal d’élevage n’est pas si bête
26 octobre 2021, par Mathilde COUDRAYL’évolution de l’élevage et la construction des « productions animales » se sont appuyées sur un changement drastique du statut de l’animal d’élevage. À partir du milieu du 19e siècle en France, la zootechnie l’a déconstruit en tant qu’animal et en a fait une « bête » : chose, outil, matière, minerai. Considérés ainsi par les procédures du travail en systèmes industriels et intensifiés, les animaux d’élevage n’en sont pas moins supposés faire preuve d’intelligence, le travail ne pouvant se faire sans leur collaboration, voire sans leur coopération. Les vaches, les truies, ne sont donc pas si « bêtes » et la majorité des éleveurs qui, au quotidien, travaillent avec elles en sont intimement convaincus. Les animaux résistent à la bêtise, persistent dans leur être animal et leur désir de vivre en relation au monde. C’est bien cette résistance, jugée nuisible à la productivité, qui conduit aujourd’hui à robotiser le travail et à accélérer l’entreprise techno-biologique de réification des animaux d’élevage.
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Gouverner la qualité alimentaire par les applications
3 novembre 2021, par Mathilde COUDRAYL’actualité du marché des produits de grande consommation est marquée par l’apparition d’applications mobiles permettant aux consommateurs d’évaluer les produits alimentaires en scannant leurs codes-barres. Cet article analyse les critères de qualification et de notation des produits mobilisés par ces applications et les projets controversés de gouvernement des conduites qui les sous-tendent. Il montre que les applications évaluent les produits à partir de conceptions plurielles du « bien manger », qu’elles s’articulent autour de quelques dimensions prépondérantes (la qualité nutritionnelle, les additifs et le niveau de transformation des produits) et qu’elles participent tout à la fois à prolonger et à détourner l’action des pouvoirs publics en matière de gouvernement des conduites alimentaires et d’information du consommateur.
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Nourrir les morts ou « Celui qui fait vivre », les différents régimes de commensalité rituelle chez les Mixe (Oaxaca, Mexique)
26 octobre 2021, par Mathilde COUDRAYAu Mexique, les célébrations publiques et privées liées à la Toussaint (Día de Muertos), tout autant que la multiplication des représentations de la mort sous la forme de la Catrina ou de squelettes, font désormais partie d’une culture populaire se diffusant bien au-delà des frontières du pays. Le développement d’un tel imaginaire, notamment dans les zones urbaines, tend à accréditer l’idée selon laquelle les Mexicains entretiendraient un rapport de proximité avec les morts qu’ils accueilleraient en leur offrant des repas dans une atmosphère festive au moment de leur retour annuel. En réalité, l’observation ethnographique des transferts alimentaires destinés à ces visiteurs dans les communautés de Mixe vivant dans l’État d’Oaxaca prouve que la crainte de voir les morts rester dans la sphère domestique ne disparaît pas à la Toussaint. Pour le démontrer, cet article mène une étude contrastive des régimes de commensalité associés aux dépôts cérémoniels – associés à des sacrifices de volailles – selon qu’ils sont destinés aux morts ou à une entité appelée « Celui qui fait vivre ». Alors que l’anthropologie religieuse s’est souvent consacrée à l’étude de la symbolique des éléments transférés lors d’une offrande alimentaire, l’angle d’analyse adopté se concentre sur les dynamiques interactionnelles grâce auxquelles est mise en scène l’acceptation de ces transferts par ces différents destinataires. En dépit des similitudes dans la morphologie rituelle, on découvre alors que les dépôts de nourritures n’établissent pas les mêmes types de relations avec les morts ou avec « Celui qui fait vivre ».